J’ai marié un tireur


Le registre des armes d’épaules (car il s’agit du nom juste du registre des armes à feu) est de retour sur la sellette, quoique il ne l’ai jamais vraiment quitté. Les lignes téléphoniques sont ré-ouvertes et on ressort les “pundits” des boules-à-mites. Les arguments sont recyclés et répétés et en fin de compte personne ne change d’opinion. Ceux qui supportent le registre le supportent toujours et ceux qui s’y opposent s’y opposent encore.

M. et Mme tout-le-monde s’en tiennent à leur opinion généralement aquise et rarement adéquatement informée, et ce des deux côtés du débat. Les supporteurs du registre assument que ceux qui s’y opposent s’opposent au contrôle des armes à feu. Ceux qui s’opposent au registre accusent ceux qui le supportent de vouloir criminaliser les fermiers et les chasseurs. Or, le registre n’est pas la seule forme de contrôle des armes à feu et je peux compter sur les doigts d’une demi-main ceux qui comprennent le mécanisme par lequel le registre criminalise les honnêtes propriétaires d’armes d’épaule. Alors de là à en faire une conspiration…

Face au débat sur le registre des armes d’épaule, je me trouve dans la situation particulière d’être une personne qui porte très peu d’intérêt naturel aux armes à feu. En fait, je n’aime pas les armes à feu. Je ne chasse pas, je ne fait pas de tir à la cible, je suis myope et un peu maladroite et j’ai un seuil de tolérance plutôt bas pour le bruit. Moi et le tir, nous ne sommes pas faits pour aller ensemble. Et pourtant, je supporte l’abolition du registre bien que je sois en faveur du contrôle des armes à feu.

Voyez-vous, les armes à feu sont un peu comme ma belle-famille: elle sont venues avec le gars. J’ai marié un tireur. Je suis devenue par alliance une propriétaire d’armes à feu. À chaque fois que mon permis de conduire ou ma plaque d’immatriculation est contrôlée par la police, que ce soit à un barrage routier, à la frontière ou — très rarement — pour une contravention au code de la route, une requête est envoyée au registre. On entend souvent les défenseurs du registre demander “S’ils n’ont rien à cacher, pourquoi les contrôles les dérangent?” Parceque je ne sais jamais si ma voiture va être fouillée de fond en comble lorsque que je croise un policier? Un contingent de policiers armés jusqu’aux dents peut débarquer chez moi à chaque instant pour vérifier que les armes de mon mari sont entreposées sécuritairement. C’est bien? En théorie oui, en pratique… Allez lire cet article et assurez-vous d’en lire l’extrait sur Peter Sedge. Est-ce qu’on peut vraiment reprocher à ceux “qui n’ont rien à cacher” de redouter les forces de l’ordre? Et depuis que j’ai vu le vidéo des policiers de Gatineau qui essaient d’abattre une vache errante avec leur arme de poing, je suis convaincue que le policier moyen en connais moins sur le fonctionnement et le maniement des armes à feu que mon fils de 14 ans.  (Voici le lien de la rencontre vache-police mais n’y allez pas si vous êtes un ami des bêtes: c’est dur).

Au cours de mes années de cohabitation avec une armoire pleine de fusils, j’ai appris à les apprécier à distance. Lorsque mes deux plus vieux ont commencé à tirer, j’ai vu à quel point cette marque de confiance venant de leur père les avait fait grandir. Puis mon fils s’est pris d’une véritable passion pour le tir et les armes à feu. Plutôt que de m’en inquiéter, j’ai découvert à travers ses yeux à quel point la science qui sous-tend l’armement peut être fascinante. Croyez-moi, il y a beaucoup plus de physique, de mathématique et de génie mécanique en balistique que mon fils n’en apprendra jamais à l’école. Et puisque les paramètres scientifiques changent avec chaque arme, j’ai même appris à apprécier pourquoi les tireurs sont souvent des collectionneurs. Voici mon fils en action lors d’un voyage aux États-Unis:

Grâce au tir mes plus vieux ont mis le pieds dans un monde d’adultes duquel ils peuvent se faire remercier à la moindre niaiserie. Ils y apprenent à prendre et intégrer la critique constructive, à respecter l’autorité et la hiérarchie du champ de tir. Ils sont initiés à un monde de précision, d’ordre et de méthode où chaque geste compte et où la sécurité est primordiale. C’est une culture fascinante dont la beauté sauvage est complètement ignorée dans un débat polarisé aux deux extrêmes du gros bon sens.

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Le registre des armes d’épaules (car il s’agit du nom juste du registre des armes à feu) est de retour sur la sellette, quoique il ne l’ai jamais vraiment quitté. Les lignes téléphoniques sont ré-ouvertes et on ressort les “pundits” des boules-à-mites. Les arguments sont recyclés et répétés et en fin de compte personne ne change d’opinion. Ceux qui supportent le registre le supportent toujours et ceux qui s’y opposent s’y opposent encore.

M. et Mme tout-le-monde s’en tiennent à leur opinion généralement aquise et rarement adéquatement informée, et ce des deux côtés du débat. Les supporteurs du registre assument que ceux qui s’y opposent s’opposent au contrôle des armes à feu. Ceux qui s’opposent au registre accusent ceux qui le supportent de vouloir criminaliser les fermiers et les chasseurs. Or, le registre n’est pas la seule forme de contrôle des armes à feu et je peux compter sur les doigts d’une demi-main ceux qui comprennent le mécanisme par lequel le registre criminalise les honnêtes propriétaires d’armes d’épaule. Alors de là à en faire une conspiration…

Face au débat sur le registre des armes d’épaule, je me trouve dans la situation particulière d’être une personne qui porte très peu d’intérêt naturel aux armes à feu. En fait, je n’aime pas les armes à feu. Je ne chasse pas, je ne fait pas de tir à la cible, je suis myope et un peu maladroite et j’ai un seuil de tolérance plutôt bas pour le bruit. Moi et le tir, nous ne sommes pas faits pour aller ensemble. Et pourtant, je supporte l’abolition du registre bien que je sois en faveur du contrôle des armes à feu.

Voyez-vous, les armes à feu sont un peu comme ma belle-famille: elle sont venues avec le gars. J’ai marié un tireur. Je suis devenue par alliance une propriétaire d’armes à feu. À chaque fois que mon permis de conduire ou ma plaque d’immatriculation est contrôlée par la police, que ce soit à un barrage routier, à la frontière ou — très rarement — pour une contravention au code de la route, une requête est envoyée au registre. On entend souvent les défenseurs du registre demander “S’ils n’ont rien à cacher, pourquoi les contrôles les dérangent?” Parceque je ne sais jamais si ma voiture va être fouillée de fond en comble lorsque que je croise un policier? Un contingent de policiers armés jusqu’aux dents peut débarquer chez moi à chaque instant pour vérifier que les armes de mon mari sont entreposées sécuritairement. C’est bien? En théorie oui, en pratique… Allez lire cet article et assurez-vous d’en lire l’extrait sur Peter Sedge. Est-ce qu’on peut vraiment reprocher à ceux “qui n’ont rien à cacher” de redouter les forces de l’ordre? Et depuis que j’ai vu le vidéo des policiers de Gatineau qui essaient d’abattre une vache errante avec leur arme de poing, je suis convaincue que le policier moyen en connais moins sur le fonctionnement et le maniement des armes à feu que mon fils de 14 ans.  (Voici le lien de la rencontre vache-police mais n’y allez pas si vous êtes un ami des bêtes: c’est dur).

Au cours de mes années de cohabitation avec une armoire pleine de fusils, j’ai appris à les apprécier à distance. Lorsque mes deux plus vieux ont commencé à tirer, j’ai vu à quel point cette marque de confiance venant de leur père les avait fait grandir. Puis mon fils s’est pris d’une véritable passion pour le tir et les armes à feu. Plutôt que de m’en inquiéter, j’ai découvert à travers ses yeux à quel point la science qui sous-tend l’armement peut être fascinante. Croyez-moi, il y a beaucoup plus de physique, de mathématique et de génie mécanique en balistique que mon fils n’en apprendra jamais à l’école. Et puisque les paramètres scientifiques changent avec chaque arme, j’ai même appris à apprécier pourquoi les tireurs sont souvent des collectionneurs. Voici mon fils en action lors d’un voyage aux États-Unis:

Grâce au tir mes plus vieux ont mis le pieds dans un monde d’adultes duquel ils peuvent se faire remercier à la moindre niaiserie. Ils y apprenent à prendre et intégrer la critique constructive, à respecter l’autorité et la hiérarchie du champ de tir. Ils sont initiés à un monde de précision, d’ordre et de méthode où chaque geste compte et où la sécurité est primordiale. C’est une culture fascinante dont la beauté sauvage est complètement ignorée dans un débat polarisé aux deux extrêmes du gros bon sens.

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